J’aime le jeu, l’amour, les livres, la musique, La ville et la campagne, enfin tout, Il n’est rien qui ne me soit souverain bien, Jusqu’au sombre plaisir d’un cœur mélancolique. Jean de La Fontaine

samedi 6 décembre 2014

Clemenceau de Michel Winock

Une biographie surtout politique (Winock est un spécialiste du XIXème), mais qui présente également le personnage dans sa vie quotidienne et ses dimensions psychologiques. Lecture facile d'accès, et passionnante. Il faut dire que le personnage est fascinant. Bourgeois vendéen atypique par ses convictions progressistes, il est intransigeant, incorruptible et d'un courage remarquable, il a peu changé politiquement au cours de sa vie, gardant une ligne républicaine, anticléricale, anticolonialiste (à une époque où très peu le sont), il fut aussi dreyfusard de la première heure.
Il ne laisse personne indifférent. Ce qui fait réagir ses interlocuteurs ou auditeurs, (notamment à l'assemblée nationale), c'est son ironie mordante et sa capacité de répondre du tac-au-tac aux gens qui l'interrompent dans ses discours, avec un à-propos et une capacité à les tourner en ridicule incroyables. Ce qui fait qu'il avait beaucoup d'ennemis...
A ce propos, la citation
"Ne craignez jamais de vous faire des ennemis; si vous n'en avez pas, c'est que vous n'avez rien fait."
définit assez bien son personnage.
Pendant la guerre de 14-18, il doit faire face aux socialistes pacifistes sur sa gauche et à tous les conservateurs qui ne lui pardonnent pas la séparation de l'Eglise et de l'Etat (1905), sa lutte contre le colonialisme et toutes les avancées sociales qu'il a soutenues ou mises en oeuvre. Sa ténacité fut déterminante, l'état-major allemand le considérant, comme leur vrai vainqueur. Il impressionna favorablement le monde pendant la grande guerre, en allant soutenir les poilus jusque dans les tranchées, au milieu des obus qui pleuvaient.
Son intransigeance, le respect absolu de la Loi et de l'ordre le conduisent à faire réprimer des manifestations pendant l'année où il occupe le ministère de l'Intérieur (1906). Il y a des morts, c'est une ombre dans son parcours, même s'il semble pourtant qu'il ait été modéré dans la gestion de ces temps de crise, par rapport aux pratiques de l'époque (il n'a pas utilisé la force publique de façon préventive, comme c'était l'usage).
Autre revers de la médaille, son comportement envers la mère de ses enfants, d'origine américaine, surprise avec un amant et renvoyée illico, seule aux US. Il était mal placé pour lui reprocher de folâtrer, on lui prête des centaines de maîtresses au cours de sa vie. Il eut là le comportement d'un bourgeois ordinaire de l'époque.
C'est aussi un homme d'esprit. Ses bons mots sont restés célèbres. Le plus fameux concerne Félix Faure, ce Président de la République mort en 1899 dans les bras de sa maîtresse, à l'Elysée. Clemenceau commente : "Lui qui voulait être César, il n'aura été que Pompée". Et comme il détestait Faure, il dit encore :
«Félix Faure est retourné au néant, il a dû se sentir chez lui». C'était une teigne...
En février 1913, Clemenceau soutient Jules Pams à l'élection à la Présidence de la République. Ministre de l'agriculture, ce radical parait malgré tout fade à Clemenceau. Il en dit :"Ce n'est pas un homme, c'est un bruit !" Et comme on lui fait remarquer qu'il n'est pas plus bête qu'un autre, Clemenceau demande :"Où est l'autre ?"
































Quelques autres citations de Clemenceau :

  • "La grande maladie de l'âme, c'est le froid"
  • "Des jeunes gens sons venus avec des idées de vieux, qui ne veulent plus de vieux avec des idées de jeunes... des actes, des actes."
  • "Ah l'Angleterre cette colonie française qui a mal tourné"
  • "L'anglais, ce n'est jamais que du français mal prononcé"
  • "Pour mes obsèques, je ne veux que le strict nécessaire, c'est-à-dire moi"
  • "La guerre ! C’est une chose trop grave pour la confier à des militaires" (1886)
  • "Il est plus facile de faire la guerre que la paix"
  • "Il suffit d'ajouter "militaire" à un mot pour lui faire perdre sa signification. Ainsi la justice militaire n'est pas la justice, la musique militaire n'est pas la musique."
  • "Ne craignez jamais de vous faire des ennemis ; si vous n'en avez pas , c'est que vous n'avez rien fait"
  • "Quand on a du caractère, il est toujours mauvais"
  • "La France est un pays extrêmement fertile : on y plante des fonctionnaires et il y pousse des impôts"
  • "Un escalier de ministère est un endroit où des gens qui arrivent en retard croisent des gens qui partent en avance"
  • "Les fonctionnaires sont les meilleurs maris : quand ils rentrent le soir à la maison, ils ne sont pas fatigués et ont déjà lu le journal"
  • "Il faut d'abord savoir ce que l'on veut,
    il faut ensuite avoir le courage de le dire, il faut ensuite l'énergie de le faire"
  • "L'homme absurde est celui qui ne change jamais"
  • "Une dictature est un pays dans lequel on a pas besoin de passer toute une nuit devant son poste pour apprendre le résultat des élections"
  • "Un traître est celui qui quitte son parti pour s'inscrire à un autre ; et un converti, celui qui quitte cet autre pour s'inscrire au vôtre"
  • "Les polytechniciens savent tout, mais rien d'autre" 
  •  "Donnez-moi quarante trous du cul et je vous fais une Académie française"




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