J’aime le jeu, l’amour, les livres, la musique, La ville et la campagne, enfin tout, Il n’est rien qui ne me soit souverain bien, Jusqu’au sombre plaisir d’un cœur mélancolique. Jean de La Fontaine

dimanche 26 octobre 2014

Chili : mémoire de la dictature

Il semblait que contrairement à l'Argentine où la période atroce de la dictature des colonels (1976-1983)  a donné lieu à de multiples procès et condamnations de militaires ("Ni oubli ni pardon" peut-on lire sur les murs, comme ici dans le quartier de la Boca à Buenos Aires),




















au Chili, le travail de mémoire ait été plus lent, plus difficile. D'une part, certaines personnes contestent le caractère sanglant de la dictature de Pinochet, en s'appuyant sur les chiffres des disparus, comparés à ceux qu'on évoque pour l'Argentine (40 000, contre "seulement" 4000 au Chili), d'autre part, l'héritage politique du général assassin de Allende n'est pas renié en bloc aujourd'hui encore, y compris par le personnel politique de droite. On l'a bien entendu lors des dernières élections présidentielles.

Or, il semblerait que cela bouge doucement sur ce front.

En septembre, on apprenait que les assassins de Victor Jara étaient recherchés par la justice chilienne.



Quarante-et-un an après le coup d'Etat militaire du 11 septembre 1973, trois militaires ont été inculpés pour le meurtre du chanteur.
















Il est devenu le symbole des crimes terrifiants commis au Chili par les putschistes du général Augusto Pinochet : Victor Jara, chanteur populaire et compositeur, célèbre au-delà de l’Amérique latine, a été tué, à 40 ans, à Santiago, cinq jours après le coup d’Etat contre le socialiste Salvador Allende, le 16 septembre 1973. L’icône de « la nouvelle chanson chilienne » était un artiste engagé, membre du Parti communiste chilien, qui puisait son inspiration dans la vie quotidienne du petit peuple. Il fut fusillé d’une rafale de mitraillette dans le stade de Santiago, transformé en camp de détention et de torture. L’autopsie a montré plus de 44 impacts de balles. Avant de le tuer, on lui écrasa les doigts à coups de crosse et on lui coupa les mains. « Joue de la guitare maintenant », lui ont lancé ses bourreaux.

Article du Monde, blog "Amériques".

Les jours derniers, on apprenait que d'anciens responsables de la dictature, y compris des proches de Pinochet étaient arrêtés pour faits de torture et de meurtres.







Vue aérienne du mémorial pour les disparus sous la dictature d'Augusto Pinochet, de 19973 à 1990, à Santiago. 
 
 Mémorial pour les disparus de la dictature de Pinochet (1973 - 1990), Santiago.

Cristian Labbé, ancien maire de Santiago et ex-ministre et garde du corps d'Augusto Pinochet, a été arrêté, lundi 20 octobre, avec neuf autres anciens officiers chiliens. La justice chilienne l'accuse d'avoir fait partie d'une organistion illégale composée de policiers de militaires et de civils, coupables d'avoir torturé et tué treize opposants durant la dictature.
"Nous sommes très choqués, car après enquête, il a été prouvé qu'il n'a jamais torturé personne, et il n'a pas commis de meurtre ", a affirmé l'avocat de Labbé, Cristian Espejo, qui a indiqué à une chaîne locale qu'il comptait demander sa mise en liberté.
Les crimes ont été commis après le coup d'Etat du 11 septembre 1973 dans une caserne de San Antonio, à quelque 120 km à l'ouest de Santiago, selon l'enquête judiciaire. La caserne Tejas Verdes de San Antonio était un centre de détention et de torture redouté, où étaient formés les agents de la DINA, la police secrète de la dictature, et où selon les témoignages recueillis par une commission officielle, les détenus étaient frappés, torturés à l'électricité, brûlés ou soumis à des simulacres d'exécution.

3 200 MORTS ET 38 000 DÉTENUS TORTURÉS
Après avoir pris sa retraite de colonel et été ministre sous la dictature, Cristian Labbé, membre de l'aile droite de l'Union démocratique indépendante (UDI), a été maire pendant seize ans du quartier de Providencia dans la capitale, jusqu'en 2012. Il est connu comme un ardent partisan du dictateur Augusto Pinochet (1973-1990) dont il a été un temps garde du corps.
La répression exercée par la dictature de Pinochet a fait plus de 3 200 morts et plus de 38 000 détenus ont été torturés, selon des chiffres officiels. Le général Pinochet est décédé en 2006, sans jamais avoir été jugé. Début septembre, au moins 3 000 personnes avaient manifesté pour demander au gouvernement la fin de l'impunité pour les responsables de la répression durant la dictature militaire.

Même source.


Cette question mémorielle est un des symptômes d'une société chilienne en mutation.

 http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2014/09/08/chili-des-milliers-de-personnes-defilent-en-souvenir-des-victimes-de-pinochet_4483358_3222.html



On sent des aspirations nouvelles, des choses impensables il y a quelques années, sans doute liées au dynamisme économique. Les étudiants manifestent pour le droit aux études gratuites, le conservatisme religieux est ébranlé (coming out d'homosexuels), la société civile par le biais des syndicats réclame une réforme du droit du travail...



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